Faire une pause et réfléchir
Depuis quelques années, les salariés de FTV sont emportés dans une sorte de spirale, un maelström, dont ils se demandent s’ils vont toucher le fond.
Spirale des réorganisations qui se superposent les unes aux autres, sans que les précédentes soient véritablement digérées.
Spirale des évolutions technologiques, qui rend obsolète la dernière innovation à peine a-t-elle été mise sur le marché.
Et maintenant spirale inflationniste qui revoit à la baisse mois après mois leur salaire réel.
Ce gouvernement réussit en effet l’exploit historique de faire entrer le pays dans une spirale inflationniste, sans augmenter les salaires.
Aujourd’hui, il en appelle à la responsabilité des entreprises, mais sans peser sur les négociations salariales.
A FTV, les choses sont claires, contraintes budgétaires obligent, les salariés n’auront droit qu’à une hausse générale de 1,02 % en moyenne.
Une misère, par rapport au niveau de l’inflation, de près de 6 % ces derniers mois.
Les comités de salaires, qui se sont tenus récemment, ne pourront compenser l’appauvrissement généralisé des salariés.
Pour les quelques heureux élus qui auront droit à une mesure pécuniaire cette année, l’augmentation ne sera que de 2 à 3 % ; toujours en dessous de l’inflation.
Même les gagnants seront les perdants.
Cette politique salariale, totalement illisible, incohérente, génère découragement et sentiment d’injustice chez de nombreux salariés.
Pendant trois jours, la direction a écouté les demandes des organisations syndicales pour corriger les disparités accumulées au fil des ans.
Mais c’est un dialogue à l’aveugle pour les représentants syndicaux, car ils n’ont pas le même niveau d’information.
Comme on ne connaît pas la liste initiale des mesures demandées par les différentes directions, on ne peut donc pas savoir quelles seront les modifications apportées après les comités de salaires.
A cela s’ajoute les critères de disparité, qui sont complètement faussés.
On a ainsi des journalistes qui stagnent depuis plus de dix ans au niveau de grand reporter 1, avec 40 ans d’ancienneté, et qui apparaissent avec un taux élevé sur la courbe de tendances, alors qu’un journaliste qui a bénéficié d’une promotion éclaire pourra apparaître discriminé.
Chez les PTA, ce n’est pas le même cas de figure, mais l’avenant 16 de l’accord d’entreprise, que n’a pas signé la CGT, risque de produire les même effets pervers, avec des salariés scotchés pendant des années au même niveau, et une progression salariale qui ne tient compte que de l’ancienneté et de l’âge.
Pour eux aussi, plusieurs disparités n’apparaissent pas : celle des salariés qui ont eu une expérience dans une autre entreprise, et qui n’est pas prise en compte. Si elle l’était, ce serait l’équivalent de la carte de presse pour les journalistes. Et d’autre part, celle des PTA reconvertis en journalistes, qui sont supposés n’avoir rien fait auparavant, puisque leur ancienneté ne démarre qu’avec leur carte de presse.
Tous ces salariés, qui vont devoir se serrer la ceinture, même s’ils ne font pas parties des bas revenus, doivent en plus faire face à des baisses d’effectifs qui créent des situations tendues dans la plupart des services.
Ou bien à des réorganisations dont ils ne voient pas la finalité. Ou pire, dont ils pensent qu’on leur cache la finalité.
Il suffit de lire le compte rendu du service de santé au travail pour se rendre compte qu’une réorganisation comme la fusion des rédactions de France 2 et France 3 n’est toujours pas réalisée. Il existe toujours une division entre anciens de France 2 et anciens de France 3 au service société, écrit le médecin du travail. Mais déjà, se profile une autre réforme d’une ampleur comparable qui risque de faire autant de dégâts. L’expertise demandée sur Diego Garcia n’a pas suffi.
Dans d’autres services, comme les équipes légères de la Fabrique, c’est le sous-emploi et l’absence de perspectives qui mine les salariés. Là, c’est un service qu’on laisse mourir, faute de lui avoir donné les moyens de se développer. Comme d’autres avant lui : comme le service Afrique de franceinfo.fr, qui s’est éteint ce mois-ci sans faire de bruit.
Emportés dans cette spirale descendante des salaires, dans ce tourbillon des réorganisations qui donnent le tournis, des transformations numériques qui épuisent le budget de formation et essorent les salariés, des externalisations qui vident de sens leur travail, il est peut-être temps de faire une pause et de réfléchir, de se demander collectivement ce que nous voulons faire de ce grand média de service publique qu’est France Télévisions. Au lieu de se laisser transbahuter dans un navire sans cap.
Paris, le 25 octobre 2022
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