Lettre ouverte à l’attention de Madame Delphine Ernotte-Cunci, Présidente de France Télévisions.
L’intersyndicale a appris qu’une chargée d’édition de Franceinfo.tv n’a pas été retenue sur le poste de chef monteur qu’elle briguait. Ce poste était pourtant ouvert à la reconversion, fait rendant encore plus incompréhensible la décision, alors que cette salariée se trouve, comme plusieurs de ses collègues, dans une situation de souffrance professionnelle avérée. Or, ce refus vient s’ajouter à la longue liste des tentatives des chargés d’édition d’échapper à leur situation via des mutations.
Il intervient d’autre part alors qu’une saisine à propos de Franceinfo.tv est en cours et que vous avez été interpellée directement en mars 2020 sur la situation de grande souffrance de ce corps de métier. En effet, il ne s’agit pas d’un fait isolé mais bien du dernier exemple en date illustrant le traitement qui leur est réservé.
Entre cette alerte en mars et le 6 novembre, il n’y a eu aucune réunion de saisine. Et ce nonobstant une réponse de Monsieur Lesaunier (en date du 11 mars) invitant à ce qu’une « nouvelle réunion d’échanges puisse être rapidement reprogrammée dans le cadre de la saisine toujours ouverte. »
Dans le même temps, trois directeurs se sont succédé à Franceinfo.tv : Alexandre Kara, Laurent Guimier et Sophie Guillin. Ceci n’est pas un gage de stabilité.
Nous avons rappelé dans notre compte rendu de saisine qu’ « en plus des évolutions de planification et de statut, les salariés en souffrance doivent être aidés dans leur désir de reconversion ou de mobilité. Ils sont aujourd’hui bloqués sur leurs postes parce que leurs conditions de travail ne font rêver personne… mais aussi parce qu’aucune évolution de carrière ne leur est proposée ! »
Dans ce même document, les représentants du personnel rappellent également « qu’une part importante des salariés a subi des arrêts de travail, dont certains de très longue durée, signe d’un malaise endémique. Le bilan médical de 2019 parle de lui-même… Tout comme le rapport mené par les ergonomes de France Télévisions ! »
À travers le cas évoqué, nous avons non seulement la démonstration de la situation de blocage sur leur poste que connaissent les chargés d’édition de Franceinfo.tv, mais surtout celle de l’absence de prise en compte de la souffrance des salariés voire de sa totale négation. Et ce, malgré des alertes répétées, et alors même que l’ensemble de la ligne RH est au courant de la situation : Mesdames Mayerfeld, Cellier et Monsieur Debains (responsable RH des chargés d’édition), ou encore Madame Brunois (responsable de la campagne ouverte à la reconversion dont il est ici question).
En effet, en plus de la situation de souffrance professionnelle liée à un rythme de travail délétère, la reconnaissance du poste en lui même pose problème. Ainsi nous écrivions dans notre compte-rendu : « le métier de chargé d’édition à Franceinfo doit être reconnu via une nouvelle définition des tâches, qui soit en adéquation avec l’activité spécifique des chargés d’édition sur une chaîne d’information en continu. Adéquation à trouver en fonction de la définition prévue par l’accord collectif et les nomenclatures des métiers. Dans ce contexte il prend un tout autre sens : un métier spécifique, caractérisé par un très haut niveau d’intensité, où les salariés sont encore plus autonomes qu’ailleurs. À cette demande s’ajoute le souhait d’une revalorisation salariale. »
Si la question de leur souffrance professionnelle est fondamentale, elle est donc à envisager dans l’ensemble de ses dimensions car à des rythmes professionnels délétères s’ajoute un manque de reconnaissance et de débouchés particulièrement destructeur. Un simple élargissement de la définition du poste sans la moindre contrepartie comme cela s’est déjà produit ne saurait en aucune manière constituer une réponse recevable.
Après un an de réunions de saisine, les salariés concernés et les représentants du personnel attendent désormais des actes forts et rapides pour améliorer une situation particulièrement néfaste dont les conséquences n’ont que trop pesé sur la santé des salariés.
En conséquence Madame la Présidente, il nous semble que votre responsabilité est très clairement engagée dans ce qui pourrait arriver aux salariés de cette chaîne, et en particulier les chargés d’édition de Franceinfo.tv. Nous en sommes d’autant plus convaincus que l’inspecteur du travail attirait votre attention sur les obligations de l’employeur dans son courrier du 9 mars 2020.
En l’attente de votre réponse, nous restons à votre disposition.
L’intersyndicale rassemblant l’ensemble des organisations impliquées dans la saisine.
Paris le 10 décembre 2020