Préambule CSE Extraordinaire 16 avril 2020

« Les jours heureux »

 

« Il faudra se rappeler que notre pays aujourd’hui tient tout entier sur des femmes et des hommes que nos économies reconnaissent et rémunèrent si mal »  (…)

« Nous retrouverons les jours heureux. »

L’hypocrisie jupitérienne a atteint un nouveau pic à l’occasion de la prestation  télévisée du 13 avril. On se souvient des accents  guerriers* du  Clémenceau mulhousien devant l’hôpital de campagne mais là, devant les 36 millions de téléspectateurs, il faut reconnaître qu’il se sera vraiment surpassé.

S’il est quelqu’un de mal placé pour évoquer les femmes et les hommes « que nos économies reconnaissent et rémunèrent si mal », c’est bien lui !

Lui qui n’a cessé de les traiter avec mépris depuis qu’il a quitté les lambris dorés de la banque Rothschild pour se mêler de politique, lui qui évoquait il y a peu ceux qui  ne sont rien, ceux pour qui on dépense un pognon de dingue, ceux qui n’ont qu’à traverser la rue pour trouver du boulot, ceux qui rechignent à bosser pour se payer un costume…

La métaphore guerrière d’Emmanuel Macron est une ineptie. Les soignants ne sont pas en guerre. La guerre consiste à tuer des gens. Les soignants, eux, sauvent des vies. C’est très exactement le contraire.

S’il est quelqu’un de mal placé pour évoquer « les jours heureux », cette grande et belle idée inventée par le Conseil National de la Résistance, c’est bien lui !

Lui qui, depuis qu’il est arrivé au pouvoir, incarne avec constance un système libéral à l’opposé des valeurs du CNR. Lui dont la feuille de route aura consisté à démolir avec obstination tous ses acquis, en ré-pondant méthodiquement à toutes les attentes du patronat et de la finance : casse de notre Code du travail, de notre assurance chômage, de notre système de retraites solidaire, remise en cause programmée de notre sécurité sociale et de notre fonction publique…

Alors, comment croire en ce virage social de Macron ? Comment croire en un gouvernement qui aura multiplié les mensonges et l’amateurisme lors de la gestion de cette crise sanitaire. Une ministre de la santé qui déclarait le 24 janvier que le risque de propagation du virus en France était nul, un mensonge d’État sur les  stocks de masques, une criminelle impréparation sur la mise en place des tests de dépistage, une sortie du confinement qui pose tellement plus de problèmes qu’elle n’en règle, autant de messages relayés et appliqués à France Télévisions sans recul ni critique par les directions de la sécurité et de l’information…

Comment pourraient-ils y croire ces premiers de corvée,  ceux  qui  sont  en première ligne aujourd’hui, les personnels mal payés des hôpitaux et des maisons de retraite, ceux qui assurent les missions essentielles de santé et d’alimentation, les blouses blanches, les caissières, les livreurs, les routiers, les éboueurs, le personnel d’entretien et de propreté, les ouvrières et ouvriers à la tâche, le nouveau prolétariat des plateformes ? Sans oublier bien entendu les personnels de France Télévisions, eux aussi exposés, qu’ils soient sur site ou confinés à domicile, exposés à d’autres formes de pénibilité.

A moins que…

A moins que l’on ose enfin s’attaquer aux dividendes que les entreprises s’apprêtent à verser aux actionnaires du CAC 40. Pour mémoire elles atteindront 60 milliards d’euros en 2020, contre 49,2 milliards en 2019,

A moins que l’idée même de service public redevienne une priorité nationale avec un plan de réinvestissement de grande ampleur,

A moins que l’on revienne sur la réforme de l’assurance chômage et celle des retraites,

A moins que la Loi sur l’Audiovisuel ne s’inscrive pas dans une perspective de réduction drastique des emplois,

On peut rêver que France Télévisions contribue à son niveau à la construction du nouveau monde, celui du jour d’après, en produisant une information réellement pluraliste et indépendante, qui ne soit pas le relais de la communication gouvernementale, ce jour d’après la mise à mal de nos protections sociales et de nos systèmes sanitaires, d’après le moins disant social et écologique, pour que nos vies priment en- fin sur les profits de quelques-uns.

On peut rêver à ces jours heureux…

Paris, le 16 avril 2020

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